Présentation de la Commission Prospective Territoriale

Dans la continuité de ses travaux antérieurs et face à certains enjeux prioritaires dans le contexte actuel, la Commission a centré ses travaux depuis un an sur la thématique « Industries et Territoires à l’horizon 2030, Réindustrialisation et développement territorial ».

En effet, La réindustrialisation et le développement territorial est une problématique à la fois lancinante, au sens de permanente, récurrente, qui se rappelle à nous et déterminante pour l’avenir.

Lancinante, elle se lit dans les politiques publiques décidées dans l’urgence telles que « Pacte productif 2025 » et récemment « Territoires de l’industrie » ou « France relance », toujours à la recherche de la vulnérabilité économique des territoires et de la dynamique de « réencastrement de l’économie » dans la vie sociale (Karl Polanyi).

Déterminante, elle est redécouverte comme un levier de création de valeur et d’emploi après que les chantres de « l’entreprise sans usine » et de la société post-industrielle en aient fait oublier cet aspect essentiel. Ce dernier vient d’être révélé à nouveau brutalement par la crise sanitaire et les décisions de confinement. L’arrêt soudain et quasi-généralisé des économies du monde a mis à jour la réalité des chaînes de valeur mondiales et les dépendances de nos économies européennes vis-à-vis de pays émergents en ce qui concerne nos approvisionnements (produits, ressources, biens intermédiaires, composants stratégiques).

Cette question et ses débats prennent du relief au regard de la transformation du modèle de développement qui anime nos économies soumises à une dynamique de transition généralisée – écologique, énergétique, numérique. L’économiste Robert Boyer dans son ouvrage « les capitalismes à l’épreuve de la pandémie » esquisse le scénario « d’une grande bifurcation envisageable vers un nouveau modèle de capitalisme » construit sur une complémentarité entre éducation, formation, santé et culture comme réponse aux citoyens et à leur besoin de solidarité et comme réponse à la grande transition écologique en cours.

La Commission prospective territoriale a choisi de traiter cette « séquence transformatrice » à travers une lecture de la dynamique de la réindustrialisation et son impact sur le développement territorial, ce qui inclut de s’intéresser aux débats présents sur les relocalisations, les souverainetés et les identités territoriales.

La Commission mène sa réflexion dans l’esprit d’une démarche de prospective opératoire (« Comment allons-nous nous y prendre pour construire des démarches afin d’aider les territoires à anticiper »), avec la volonté d’être audible et recevable autant par les différents décideurs territoriaux (Elus parlementaires, élus régionaux et locaux) et représentants de leurs technostructures respectives, que par les acteurs économiques et sociétaux (corps intermédiaires, grandes et petites entreprises) et par les citoyens.

De plus, le groupe a posé quelques principes structurants pour la conduite de ses travaux, à savoir :

  • Placer sa réflexion dans une vision systémique des territoires, en s’appuyant sur leur capacité d’anticipation, d’autonomie et / ou d’adaptation et de résilience[1],
  • Développer des analyses et les préconisations en lien avec le référentiel que constituent les principales transitions (numérique, écologique, sociale, institutionnelle) auxquelles l’humanité est actuellement confrontée,
  • Privilégier la détermination des bonnes questions à celle d’éventuelles bonnes pratiques normatives. Cette orientation s’applique en particulier à l’identification des possibles points durs du développement local ou des grandes tendances à venir du processus de réindustrialisation.

 

[1] L’ouvrage récent « Les politiques publiques dans la crise », dir. Patrick HassenteufelSabine Saurugger appelle à dépasser le discours du changement de paradigme dû au choc et de s’intéresser aux rapports de forces intellectuels et institutionnels entre les groupes sociaux chargés de piloter la crise (la transformation). Il s’agit des politiques, les parlementaires, les experts, les lobbies, les bureaucrates. L’ouvrage de ces chercheurs conclut que le changement vient de coalition politico-académico-institutionnelle. La crise débloque les situations et provoque ces coalitions de transformation (votes de réformes).